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Blog d'informations du CDI du LP Clément Ader
9 novembre 2012

quand les élèves se font éditeurs : séquence pédagogique en lettres

Et si les éditions critiques étaient réalisées par les élèves eux-mêmes ? C'est le pari paradoxal tenu par Françoise Cahen et ses élèves de seconde du lycée Maximilien Perret d'Alfortville : une édition en format Didapages d'une pièce de Marivaux, « Le préjugé vaincu ». Ce « petit classique » de l'ère numérique est un ouvrage collaboratif (le travail a été pris en charge par différents groupes d'élèves) et interactif (çà et là le lecteur est invité à cliquer, à promener sa souris pour faire apparaître un métatexte, parfois même à rédiger...). On y trouve bien entendu la pièce de Marivaux dans son intégralité, mais le livre est, comme il se doit, augmenté : les élèves, chargés de l'appareillage critique, ont choisi et rédigé des notes de vocabulaire, construit pour les différentes scènes des questionnaires de lecture selon des approches variées (dramaturgiques, psychologiques, stylistiques, lexicales ...), préparé les réponses et les corrigés, inventé des QCM, quizz, charades, jeux de réécriture ... Un projet, à proprement parler, renversant ...

En parcourant cet ouvrage, on se rappelle à quel point les oeuvres littéraires ont souvent été saccagées par les éditions scolaires. Etouffées par des notes de bas de page, des définitions, des explications, qui donnent immédiatement aux élèves l'impression que le texte lui-même sera incompréhensible, qui réfrènent le désir de la lecture. Emprisonnées par un appareil critique, des études thématiques, des analyses de textes, qui, voulant guider la compréhension, ferment en réalité le sens, qui brident la liberté du lecteur. Les « Petits classiques » de notre enfance relèvent d'une pédagogie verticale et magistrale, dont il y a lieu de s'étonner qu'elle règne encore aujourd'hui dans les représentations des éditeurs, tant elle contribue à faire du livre le lieu d'une mise à distance avec le savoir, plus qu'elle ne favorise une réelle appropriation. Que les choses soient claires : la plupart du temps, le paratexte, loin d'enrichir le texte, l'appauvrit ; il le vide de sa vitalité, donc de sa substance ; les éditions critiques, si elles peuvent être utiles aux enseignants, sont souvent pour les élèves des tue l'amour de la littérature.
En parcourant cet ouvrage, on réalise précisément à quel point il faut réinventer la relation des élèves au livre, sinon le livre lui-même, pour que l'école soit le lieu de rencontres directes et vivantes avec la littérature. On constate une fois de plus combien le numérique peut être alors l'outil de pédagogies actives permettant de développer l'intelligence et le plaisir de l'oeuvre. On saisit aussi combien il importe que les élèves soient mis en situation d'interroger eux-mêmes le texte, plutôt que de simplement répondre aux questions du professeur comme c'est si souvent le cas. On voit enfin combien, pour que l'élève accroisse sa maîtrise, il est utile de lui faire endosser les habits du maître, en l'occurrence ici la posture de l'expert en littérature.
Source :  Café Pédagogique Mensuel - EDITION LETTRES/ octobre 2012
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